Les meublés Touristiques au Val d'Europe
Un sérieux tour de vis contre les locataires saisonnières type Booking, Abritel ou Airbnb. Les 48 élus intercommunaux de Val d’Europe Agglomération (Seine-et-Marne) ont voté à l’unanimité toute une série de restrictions à l’encontre des meublés touristiques, le 7 juillet dernier.
S’il est impossible de connaître précisément leur nombre, ces locations se comptent par milliers sur le territoire qui s’est développé avec l’installation de Disneyland Paris, va- lidée en 1987, passant ainsi de 4 000 à 51 000 habitants. Fort de ses 42 millions de visiteurs annuels, grâce aux parcs d’attractions et aux centres commerciaux Val-d’Europe et la Vallée-Village, l’agglomération est devenue la première destination touristique d’Europe.
Malgré les 12 000 chambres d’hôtel qui en font le second pôle hôtelier de France derrière la capitale, « les locations saisonnières se sont tellement multipliées qu’aujourd’hui elles cannibalisent tout le parc immobilier », déplore Philippe Descrouet, maire (UDI) de Serris et président de Val d’Europe Agglomération.
Trois ans de sursis pour les particuliers
La preuve : 20 % des logements du centre urbain, soit une partie des villes de Serris et Chessy à l’intérieur du boulevard circulaire, sont voués en permanence aux locations saisonnières, « c’est presque une habitation sur quatre hors logements sociaux », ajoute l’élu. Dans certaines copropriétés, leur part atteindrait les 60 %. Philippe Descrouet précise bien que ces restrictions ne s’adres- sent pas aux propriétaires souhai- tant se faire un complément de revenus. Ainsi, les personnes qui louent leur logement principal moins de 120 jours par an ne sont pas concernées. En revanche, sont visées les personnes physiques et morales qui mettent leur résidence secondaire en meublé touristique. « Des professionnels des locations qui détournent ainsi des logements familiaux », dénonce l’élu.
Si ces professionnels veulent poursuivre cette activité, ils devront faire une déclaration de changement d’usage en mairie de l’une des dix communes de l’agglomération. Seule une extrême minorité pourra voir sa demande aboutir car les élus ont décidé de limiter à 2 % le nombre de meublés touristiques sur l’ensemble des logements dans le centre urbain et à 1 % dans le reste de l’agglomération.
Tandis que les personnes morales devront respecter les nouvelles règles à partir du 1er janvier 2023, les personnes physiques qui louent leur résidence secondaire auront, elles, trois ans de sursis pour un seul logement.
À cela vient s’ajouter une autre mesure : il ne pourra pas y avoir plus de 2 % de locations de meublés de tourisme par copropriété. Par exemple, pour un immeuble de 75 appartements, un seul pourra accueillir des touristes. « Pour les départager, un huissier de justice tirera les locations au sort afin d’éviter tout soupçon de favoritisme », précise Philippe Descrouet.
Le neuf atteint les 6 000 € du mètre carré à Serris. Si de telles dispositions ont été prises, c’est par ce que « cette situation entraîne beaucoup de nuisances », poursuit le maire. En premier lieu pour les riverains : « La police municipale est très sollicitée pour des tapages nocturnes, elle peut dresser des contraventions mais à chaque fois ce ne sont pas les mêmes locataires, ça ne sert à rien. »
Surtout, l’élu pointe le manque de logements pour les familles du territoire : « On a beau construire, les biens sont achetés tout de suite pour de la location saisonnière, ça accapare tout. » Alors que le secteur recense de nombreux sièges sociaux, « les salariés de ces entreprises ont besoin de se loger mais c’est devenu très cher ».
Un constat partagé par Alexandre Truong, responsable de l’agence Century 21 du Val-d’Europe : « Les premiers habitants du Val d’Europe ont bénéficié de prix attractifs dans les années 2000 avec des valeurs voisinant les 3 000 € au mètre carré, mais la demande étant devenue
très supérieure à l’offre, le prix de vente moyen a atteint le seuil de 6 000 € du mètre carré sur certains programmes neufs à Serris. »
Des résidences réservées aux touristes ?
Une hausse significative notamment car, depuis cinq ans, « de nombreux acheteurs ont délaissé l’investissement locatif classique pour se tourner vers de la location saisonnière », précise-t-il. Parmi ses clients, ils sont environ 15 % à avoir fait ce choix. Et cette augmentation s’est généralisée à toutes les communes limitrophes, selon Alexandre Truong.
Il précise toutefois que cette haus- se des prix résulte aussi de la forte attractivité du territoire avec son bassin d’emplois, la présence d’une double gare RER et TGV, l’accès direct à l’autoroute A4 ou encore la proximité avec l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.
Philippe Descrouet plaide pour la création de résidences dédiées à ces locations de courte durée et situées dans des zones bien spécifiques en dehors des habitations mais proches de Disneyland Paris. À l’instar de Villages Nature Paris. « Cela arrangerait tout le monde et cela permettrait à ceux qui le souhaitent d’investir et louer quand même. »
Même s’il s’attend à ce que cette règle fasse l’objet de recours devant le tribunal administratif de Melun, Philippe Descrouet espère qu’elle fera jurisprudence dans le reste des zones touristiques de France
Source : Le Grand Parisien / Jeanne Cassard